1// Le cadre politique et juridique
Chaque année, entre 6.000 et 8.500 personnes étrangères sont détenues dans des centres de détention (“centres fermés”) en Belgique, parce qu’elles n’ont pas de titre de séjour, ou qu’elles demandent l’asile à la frontière.
Même quand cette détention est de courte durée, elle laisse des traces durables dans la vie des personnes concernées et de leurs proches. Au-delà de l’impact au niveau humain, la détention administrative des personnes étrangères est une pratique coûteuse et inefficace au vu de l’objectif déclaré: assurer l’expulsion du territoire de personnes sans titre de séjour. Pour diverses raisons, de nombreuses personnes ne sont pas expulsées à la suite de leur détention.
Toute forme de détention arbitraire étant interdite en droit international, l’État ne peut en principe recourir à la détention administrative qu’en dernier ressort, c’est-à-dire quand d’autres moyens moins coercitifs ne peuvent être utilisés. Pour suivre ce cadre juridique, des acteurs de la société civile ont proposé, dès les années 1990, diverses pratiques alternatives à la détention et ont incité les États à les adopter. Ces “alternatives” ont gagné du terrain ces dernières années vu l’évidence de l’inefficacité, du coût et de l’inhumanité de la détention administrative. Comme de nombreux autres États, la Belgique s’est engagée aux niveaux international, européen et national à les mettre en œuvre.
Le concept des “alternatives à la détention” reste néanmoins contesté. La société civile, dont le CIRÉ, insiste sur une interprétation non-restrictive et promeut des mesures respectueuses des droits fondamentaux, comme l’accompagnement individuel. Les mesures mises en avant par des acteurs publics, comme l’assignation à résidence avec des bracelets électroniques, reposent plutôt sur une logique de surveillance et de contrôle. Au lieu de remplacer la détention, les “alternatives à la détention” sont ainsi utilisées pour justifier la mise en place d’outils de contrôle supplémentaires des personnes sans titre de séjour.
Cette analyse s’inscrit dans une série d’articles décryptant les “alternatives à la détention” et leur mise en œuvre. Elle abordera brièvement leur cadre juridique et politique.