AFGHANISTAN: informations sur les possibilités d’accès au territoire et la politique d’asile en Belgique

Publié le 24 août 2021 – dernière mise à jour le 31 mars 2022

Suite au retrait des forces armées internationales d’Afghanistan, la situation sécuritaire et humanitaire s’est rapidement détériorée. Le pays est désormais sous le contrôle des Talibans qui ont pris le pouvoir. La situation sur place demeure volatile et préoccupante sur tout le territoire, notamment à Kaboul.

Beaucoup de personnes originaires d’Afghanistan, en séjour légal en Belgique, nous interpellent, très inquiètes du sort de leurs proches sur place, afin de savoir si ces derniers peuvent être rapatriés d’une manière ou d’une autre, malgré la fin des opérations d’évacuation du gouvernement belge et des autres pays européens, ou obtenir un visa pour venir les rejoindre en Belgique.

D’autres personnes afghan·e·s, également présentes en Belgique, mais sans autorisation de séjour (principalement déboutées de l’asile), souhaitent savoir quelles démarches entreprendre pour obtenir elles-mêmes un statut de protection internationale, notamment du fait du changement de la situation sécuritaire et humanitaire sur place et du fait qu’elles ne peuvent plus être renvoyées en Afghanistan pour le moment.

Nous reprenons ici les principales informations que nous avons pu récolter à ce stade, utiles pour les Afghan·e·s en Belgique, pour les travailleur·euse·s du secteur, et pour les personnes désirant accompagner des Afghan·e·s en quête de protection en Belgique. La situation étant très instable sur place et la politique belge de visa et d’asile étant sur certains points incertaine, ces informations sont susceptibles d’évoluer et d’être complétées dans les semaines et mois  qui viennent. Nous vous invitons à consulter régulièrement le site du CIRÉ.

Nous invitons par ailleurs les travailleur·euse·s des services de première et deuxième ligne à nous faire part (par e-mail à Jessica Blommaert: politique@cire.be) des questionnements, dysfonctionnements ou bonnes pratiques qu’ils et elles constatent dans ce contexte particulier, afin d’interpeller les administrations et instances concernées.

Enfin, il peut être utile de consulter les sites internet des administrations et instances concernées (Office des étrangers, SPF Affaires étrangères, CGRA et Conseil du Contentieux des Étrangers) et de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Nous renvoyons également vers les informations contenues dans la communication de l’Agentschap Integratie en Inburgering qui est également mise à jour régulièrement.

Table des matières

1. Fin des opérations d’évacuation des autorités belges depuis l’Afghanistan et arrivées en Belgique

Fin de la mission d’évacuation et assistance des autorités belges

Les autorités belges ont annoncé le 25 août en fin de journée qu’elles mettaient fin, prématurément et pour des raisons liées à la sécurité, à la mission d’évacuation “Red Kite” depuis l’Afghanistan (aéroport de Kaboul) qui avait démarré le 20 août 2021. Cette opération a permis de rapatrier d’Afghanistan des Belges et leur famille ou d’évacuer des personnes afghanes éligibles à l’évacuation à savoir: des collaborateur·rices de la Défense belge; des profils “à haut risque” encourant “un danger immédiat” comme les personnes ayant travaillé pour des organisations internationales ou des ONG; des activistes des droits humains et des droits des femmes; des journalistes. D’après les autorités, aucune nouvelle opération d’évacuation n’est prévue à ce jour. Dans certaines situations, une assistance peut toutefois être fournie par les autorités belges.  

L’arrêt des opérations d’évacuation a des conséquences pour les personnes qui se trouvent encore en Afghanistan et qui ont besoin d’aide pour quitter le pays.

Les Belges et les personnes ayant un droit de séjour en Belgique peuvent en principe toujours compter sur l’assistance des autorités belges.

Pour s’inscrire ou signaler de nouvelles informations, il leur est conseillé de contacter:

Le SPF Affaires étrangères s’efforcera d’aider les personnes concernées de la manière la plus appropriée :

Fuir de Kaboul

Depuis quelques semaines, les vols à destination et en provenance de Kaboul sont limités. Un certain nombre de Belges et d’Afghan·e·s ayant un droit de séjour belge ont pu quitter l’Afghanistan sur un vol de Qatar Airlines.

En cas de places libres sur un vol, le SPF Affaires étrangères est contacté afin de permettre aux Belges et aux Afghan·e·s disposant d’un titre de séjour belge d’embarquer. Le SPF Affaires étrangères lui-même n’a pas connaissance des dates des vols ultérieurs.

Le SPF Affaires étrangères contacte alors directement les Belges et les Afghan·e·s titulaires d’un permis de séjour belge qui:

  • sont inscrit·e·s auprès du SPF Affaires étrangères (via l’une des adresses e-mail ci-dessus) et
  • sont en possession des documents nécessaires pour pouvoir voyager (permis de séjour Belgique, pièce d’identité, document de voyage,…). Il est également vérifié si les documents exigés par le Qatar ou le Pakistan sont présents.

Les personnes contactées sont mises au courant des informations sur le vol, mais doivent ensuite faire elles-mêmes les démarches nécessaires pour rejoindre l’aéroport et poursuivre leur voyage vers la Belgique.

/!\ Seuls les Belges et les Afghan·e·s ayant un titre de séjour belge (qui sont donc domicilié·e·s en Belgique) peuvent être pris·e·s en considération.

 

Soutien administratif pour le passage de la frontière Afghanistan-Pakistan

Les Belges et les Afghan·e·s titulaires d’un titre de séjour belge qui souhaitent franchir la frontière terrestre du Pakistan doivent être en possession d’un passeport valide et obtenir un e-visa auprès des autorités pakistanaises. Ce visa doit être demandé en ligne sur le site web suivant: https://visa.nadra.gov.pk/how-to-apply/. Il s’agit d’un visa touristique valable 30 jours.

Une fois en possession de leur e-visa, ils peuvent contacter l’ambassade de Belgique à Islamabad pour demander une assistance administrative afin de faciliter le passage de la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan.

Le SPF Affaires étrangères déconseille toujours formellement de se rendre à la frontière pakistanaise par la voie terrestre en raison de la situation sécuritaire précaire. Il est conseillé de prendre un vol de Kaboul au Pakistan, car les vols commerciaux reprendront, en principe, à partir de novembre 2021. Pour obtenir des informations actualisées sur la situation aux frontières terrestres de l’Afghanistan, il est utile de consulter régulièrement le site internet du HCR en Afghanistan.

Les personnes de nationalité belge peuvent, comme le prévoit le Code consulaire, toujours introduire une demande d’assistance consulaire, ou plus précisément d’aide au retour en Belgique, si elles l’estiment nécessaire. Et ce, quel que soit le pays dans lequel elles se trouvent.

Les personnes qui se trouvent en Belgique et qui ont des membres de leur famille ou des connaissances belges encore en Afghanistan peuvent contacter le Centre de crise du SPF Affaires étrangères au : +32 2 501 4000.

Les Afghan·e·s titulaires d’un visa pour la Belgique ne peuvent obtenir qu’une assistance administrative des autorités belges pour franchir la frontière terrestre avec le Pakistan. À cette fin, ils/elles doivent contacter l’ambassade de Belgique à Islamabad par e-mail: islamabad@diplobel.fed.be.

Ces personnes doivent être en possession d’un passeport valide et obtenir au préalable un e-visa auprès des autorités pakistanaises via le site https://visa.nadra.gov.pk/how-to-apply/. Il s’agit d’un visa touristique valable 30 jours.

Le SPF Affaires étrangères déconseille toujours formellement de se rendre à la frontière pakistanaise par la voie terrestre, compte tenu de la situation sécuritaire précaire. Il est conseillé de prendre un vol de Kaboul au Pakistan, car les vols commerciaux reprendront, en principe, à partir de novembre 2021. Pour obtenir des informations actualisées sur la situation aux frontières terrestres de l’Afghanistan, il est utile de consulter régulièrement le site internet du HCR en Afghanistan.

Le gouvernement belge n’offre actuellement aucune assistance aux Afghan·e·s qui n’ont pas de titre de séjour ou de visa pour la Belgique. Pour pouvoir venir en Belgique, ils/elles doivent faire usage des procédures de séjour existantes (voir ci-dessous). L’ambassade de Belgique ne les aide donc pas à traverser la frontière terrestre avec le Pakistan.

Cela s’applique également aux Afghan·e·s qui figuraient sur la liste d’évacuation lors de la mission d’évacuation d’août 2021, mais qui n’ont pas pu être évacué·e·s à temps et ne disposent pas d’un visa ou d’un titre de séjour pour la Belgqiue, ils/elles ne recevront en principe aucune aide du gouvernement belge pour quitter l’Afghanistan.

Le secrétaire d’État à l’asile et à la migration a annoncé que les personnes qui ont été évacuées par un autre État membre de l’UE peuvent se rendre en Belgique, selon certaines modalités :

  • Les Belges ou les ressortissant·e·s de pays tiers (non UE) avec un titre de séjour valable peuvent, avec l’aide éventuelle de la mission diplomatique belge compétente, retourner en Belgique sans conditions supplémentaires.
  • Pour les autres personnes, l’État membre concerné fera une demande explicite aux autorités belges, après quoi il sera examiné si elles figuraient sur la liste d’évacuation. Si tel est le cas, elles pourront alors également se rendre en Belgique.

Situation en Belgique des personnes évacuées

Les personnes arrivées en Belgique suite à l’opération d’évacuation d’août 2021 ont été enregistrées comme des victimes de catastrophes et ont reçu un formulaire d’inscription spécifique. Les personnes qui n’étaient pas en possession d’un droit de séjour en Belgique ont alors reçu un document qui leur a permis d’obtenir un visa de court séjour valable 15 jours sur une période d’un mois. 

Pour pouvoir rester plus longtemps en Belgique, elles doivent ensuite introduire, en fonction de leur situation, une demande de protection internationale (demande d’asile) ou une demande de séjour: une demande de regroupement familial (avec un·e citoyen·ne belge, un·e citoyen·ne de l’UE ou un·e ressortissant·e de pays tiers), une demande 9ter (régularisation médicale), une demande 9bis (régularisation humanitaire) ou une demande sur base de la procédure spécifique pour les mineurs étrangers non accompagnés (MENA).

En pratique, les Afghan·e·s évacué·e·s ont été redirigé·e·s vers :   

  • la procédure de protection internationale, ou
  • la procédure de regroupement familial.

S’agissant de la plupart des personnes qui ont été évacuées parce qu’elles encouraient un “risque accru” (comme celles qui ont travaillé pour l’armée belge ou pour des organisations internationales ou de défense des droits de humains, etc.), un rendez-vous a déjà été pris à leur arrivée pour programmer l’introduction d’une demande de protection internationale à l’Office des étrangers (Petit-Château). Celles qui n’ont pas encore reçu de rendez-vous peuvent se présenter spontanément au Centre d’arrivée (Petit-Château) pour s’enregistrer auprès de l’Office des étrangers ou contacter l’Office des étrangers par téléphone ou par e-mail. 

Le Commissaire général aux réfugiés et apatrides (CGRA) a indiqué que les demandes de protection internationale de ces personnes sont actuellement traitées en priorité. Le CGRA fournit également un soutien lors de l’entretien au stade de l’Office des étrangers. Si, lors de cet entretien, le CGRA estime que le profil et les motifs de persécution sont clairs, une décision peut être prise très rapidement (statut de réfugié) et, dans ce cas, aucun entretien personnel ne sera organisé ultérieurement par le CGRA.

 

Regroupement familial

S’agissant du regroupement familial, la procédure en place à cet effet ainsi que les conditions à remplir s’appliquent normalement aux Afghan·e·s évacué·e·s qui souhaitent demander le regroupement familial. Cela signifie que le/la demandeur·euse doit fournir la preuve du paiement de la redevance administrative (sauf exemption), et que les conditions matérielles doivent être remplies. Toutefois, en raison des circonstances dans lesquelles les personnes concernées ont quitté l’Afghanistan, il se peut qu’elles ne soient pas en mesure de présenter tous les documents requis. Afin de tenir compte de cette situation, l’Office des étrangers a établi un certain nombre de directives :

La demande de regroupement familial de membres de la famille (nucléaire) d’un·e Belge peut être examinée depuis la Belgique. Après l’envoi de la demande, un contrôle de résidence du logement est effectué dans les meilleurs délais. Si le contrôle de résidence est positif, et à condition que le/la demandeur·euse présente une preuve de son lien avec la personne de référence, la commune transmet le dossier à l’Office des Étrangers et la procédure normale est suivie. En revanche, si le/la demandeur·euse ne peut pas présenter de documents officiels prouvant son lien de parenté ou familial, la commune contacte l’Office des étrangers. Une première évaluation du dossier par l’OE est alors effectuée. Si la preuve du lien familial est acceptée par la commune ou l’Office des étrangers, la procédure normale se poursuit.

Dans un contexte de flexibilité, l’Office des étrangers a confirmé que la Taskara (document d’identité afghan sur lequel seule la lignée paternelle est mentionnée) peut être prise en compte lors de l’évaluation de la relation et de l’identité paternelles à l’occasion d’une demande de séjour d’un membre de la famille évacué.

Les membres de la famille des personnes ressortissantes d’un pays tiers ayant un droit de séjour en Belgique doivent en principe introduire leur demande de regroupement familial à partir du pays d’origine. Toutefois, l’Office des étrangers accepte qu’il existe des « circonstances exceptionnelles » résultant de l’évacuation qui permettent d’introduire la demande en Belgique (auprès de la commune de leur lieu de résidence).

/!\ Actuellement, cet assouplissement ne s’applique que dans l’hypothèse d’une évacuation.

L’existence de circonstances exceptionnelles qui rendent impossible l’introduction de la demande auprès de l’ambassade à Islamabad est reconnue. Après l’introduction de la demande, un contrôle de résidence est effectué dans les meilleurs délais. Si le contrôle de résidence est positif, la commune doit envoyer le dossier à l’Office des étrangers, même si le dossier est incomplet.

Accueil des personnes évacuées

À l’arrivée en Belgique, une prise en charge et un accueil a été assuré pour les personnes évacuées (qui ne disposaient pas de résidence en Belgique). Cela concerne principalement l’accueil des personnes “à haut risque” mentionnées ci-dessus. La Défense a fourni un accueil pour les personnes qui ont travaillé avec la Défense et certaines des organisations impliquées ont fourni elles-mêmes un accueil pour leurs colloborateur·rice·s ou activistes. Les autres profils ont été hébergés par Fedasil en attendant que leur demande de protection internationale soit présentée. Une fois leur demande de protection internationale formellement présentée, les personnes concernées ont droit à l’accueil matériel de la part de Fedasil et ce, pendant toute la durée de leur procédure d’asile.

2. Procédures de séjour depuis l’Afghanistan et l'étranger (visas humanitaires et regroupement familial)

Pour les personnes afghanes qui souhaitent rejoindre la Belgique (et qui n’y sont pas déjà autorisées), l’Office des étrangers a annoncé, dès le 31 août, que les procédures de séjour normales s’appliquent selon les règles en vigueur. Cette politique a été confirmée le 7 décembre 2021 sur le site internet de l’Office des étrangers.

Cela signifie que les personnes concernées doivent introduire une demande de visa auprès d’un poste diplomatique belge à l’étranger, à certaines conditions et selon une procédure particulière qui s’appliquent dans des circonstances normales, pour rejoindre la Belgique. Et donc, il n’est pas permis, par exemple, que les demandes soient introduites depuis la Belgique par une personne de référence.

Concrètement, les procédures de séjour suivantes peuvent être entreprises:

  • Visa de regroupement familial (pour un citoyen·ne belge, d’un pays tiers ou de l’Union européenne)
  • Visa humanitaire
  • Visa de « court séjour »
  • Migration par le travail
  • Visa étudiant

En pratique, les demandes de visa introduites par des Afghan·e·s, dans le contexte actuel, le sont pour des raisons familiales ou humanitaires. Les informations qui suivent ne concernent dès lors que ces deux procédures.

Aspects pratiques

Les modalités d’introduction du visa sont celles renseignées sur le site de l’ambassade de Belgique à Islamabad.

Actuellement, il n’est pas possible d’introduire une telle demande depuis la Belgique via une personne de référence. Pour l’introduction d’une demande de séjour et la délivrance d’un visa, les conditions de fond et de procédure qui s’appliquent dans des circonstances normales s’appliquent également aux ressortissant·e·s afghan·e·s.

Ce qui est évidemment très problématique, compte-tenu de la situation actuelle en Afghanistan qui empêche le déroulement normal des procédures de séjour:

  • Vu l’absence d’un poste diplomatique belge à Kaboul, les personnes doivent se rendre dans une ambassade belge dans un autre pays pour introduire leur demande. Or, la plupart des passages frontaliers avec les pays voisins sont strictement contrôlés et y accéder peut s’avérer dangereux, ce qui peut empêcher en pratique un certain nombre de personnes encore présentes en Afghanistan de se rendre dans les postes diplomatiques belges compétents notamment l’ambassade belge à Islamabad (Pakistan) qui est en principe l’ambassade compétente (sauf exceptions).
  • Vu que l’administration afghane et les services publics afghans ont été fermés jusqu’à nouvel ordre, cela rend impossible en pratique la délivrance et la légalisation de documents (tels que les certificats d’état civil et les passeports).

Une demande de visa ne peut être introduite que par la personne concernée elle-même auprès du poste diplomatique belge compétent.

L’ambassade de Belgique à Islamabad au Pakistan reste le poste diplomatique compétent pour les demandes et la délivrance de visas.

Pour se rendre au Pakistan, les ressortissant·e·s afghan·e·s doivent préalablement obtenir un visa auprès des autorités pakistanaises en ligne mais  l’ambassade de Belgique ne peut pas intervenir pour faciliter le passage à la frontière:

  • Depuis le 30 septembre 2021, l’ambassade et les consulats pakistanais en Afghanistan ne délivrent plus que des visas en ligne (e-visa).
  • Les Afghan·e·s doivent demander un e-visa via ce site web. Il s’agit d’un visa touristique valable 30 jours. Il serait également possible de demander une prolongation du visa, en ligne.
  • Un passeport valide est nécessaire pour obtenir un e-visa.
  • Le visa électronique doit être payé en ligne par carte de crédit.

Le SPF Affaires étrangères déconseille formellement de se rendre à la frontière pakistanaise par la voie terrestre, compte tenu de la situation sécuritaire précaire. Il est conseillé d’attendre la reprise des vols commerciaux de Kaboul. En principe, les vols commerciaux entre Kaboul et le Pakistan devraient reprendre en novembre 2021. Pour des informations actualisées sur la situation aux frontières terrestres de l’Afghanistan, il est utile de consulter le site web du HCR en Afghanistan.

Une fois au Pakistan, les demandes de visa doivent toujours être soumises par l’intermédiaire du partenaire sous-traitant de l’ambassade, c’est-à-dire l’un des trois bureaux de VFS Global au Pakistan (Islamabad, Lahore ou Karachi). Pour les demandeur·euse·s  afghan·e·s, une procédure sans rendez-vous (“walk-in”) est exceptionnellement prévue à l’heure actuelle, ce qui signifie qu’ils/elles ne sont pas tenu·e·s de prendre rendez-vous. Il s’agit d’une mesure temporaire. Le coût de la demande doit être payé en espèces sur place, chez le partenaire d’externalisation. Elle concerne des « frais de service » de 45,50 euros et des frais de traitement de visa de 180 euros.

En cas de problèmes lors de l’introduction de la demande (Visa On Web, système de rendez-vous, paiement des frais de service, réception de la demande), il convient de contacter l’ambassade de Belgique à Islamabad (islamabad@diplobel.fed.be) et le SPF Affaires étrangères (infovisa@diplobel.fed.be).

Pour plus d’informations sur les modalités de demande de visa, consultez le site web de l’ambassade de Belgique à Islamabad.

Exception: Pour les membres de la famille des bénéficiaires de la protection internationale, la demande de visa de regroupement familial ou humanitaire peut être introduite auprès de n’importe quel poste diplomatique belge. Les membres afghans de la famille de Belges ou d’Afghan·e·s ayant un droit de séjour en Belgique peuvent exceptionnellement soumettre leur demande à un autre poste diplomatique belge s’ils peuvent prouver qu’il leur est impossible de se rendre à Islamabad. 

Les postes-frontières officiels entre l’Afghanistan et l’Iran ne sont ouverts qu’aux Afghan·e·s muni·e·s d’un passeport valide et d’un visa pour l’Iran. L’Iran continue de renvoyer en Afghanistan les Afghan·e·s qui sont appréhendé·e·s alors qu’ils/elles tentent de franchir illégalement la frontière.

Afin de demander un visa, un certain nombre de documents doivent normalement être rassemblés en Afghanistan. Notamment : taskara, passeport, actes de mariage, de naissance et de décès, extrait de casier judiciaire, autorisation de voyager pour les enfants, certificat de disparition, etc. 

Cependant, depuis la prise du pouvoir par les Talibans, les services du gouvernement afghan sont fermés jusqu’à nouvel ordre. Il est donc pratiquement impossible d’obtenir les documents nécessaires. Aucun passeport ni aucune taskara ne sont délivrés. De même, la légalisation des documents par le Ministère afghan des Affaires étrangères n’est actuellement pas possible.

Le service des passeports du régime Taliban a annoncé que la délivrance des passeports reprendra sous peu. On ne sait pas si c’est déjà le cas dans la pratique. 

En outre, on ne sait pas encore si le gouvernement belge acceptera les documents délivrés par le régime Taliban. Cela dépend entièrement de la position (encore indéterminée) que la Belgique (et l’Union européenne) adoptera à l’égard du régime des Talibans.

Bien que les exigences légales normales continuent de s’appliquer, l’Office des étrangers laissera, dans le cadre juridique actuel, une certaine “flexibilité” en ce qui concerne les conditions procédurales (et non pas les conditions de fond) lors de l’évaluation des demandes de séjour. Chaque demande de visa tiendra compte de la situation individuelle de la personne en ce qui concerne, par exemple:

  • la présentation des documents, légalisations et passeport requis, et
  • les délais de présentation (qui s’appliquent au regroupement familial)

/!\ Il est dès lors important, si  la personne qui  introduit la demande de visa ne peut répondre à toutes les exigences, d’expliquer et de démontrer de manière proactive et complète les raisons pour lesquelles elle ne peut pas satisfaire aux exigences légales demandées dans son cas spécifique, si possible avec des documents justificatifs. La situation générale en matière de sécurité en Afghanistan ne permet pas automatiquement aux Afghan·e·s de bénéficier de certaines exemptions.

Dans ce contexte, l’Office des étrangers a demandé au partenaire sous-traitant auprès duquel les Afghan·e·s peuvent déposer leurs demandes de visa, de se conformer impérativement à l’obligation de soumettre les demandes de visa et les documents joints à l’Office des étrangers dans l’état où ils se trouvent, même en cas de demandes incomplètes. Il est ainsi possible, exceptionnellement et provisoirement, de présenter une demande de visa même si certains documents sont manquants ou incomplets.

Lors de la présentation de la demande, le/la demandeur·euse doit prouver son identité. À cette fin, un document de voyage en cours de validité (passeport afghan), ou tout document prouvant valablement l’identité, doit en principe être présenté. L’ambassade à Islamabad déclare qu’elle accepte tous les documents disponibles et examine leur adéquation au cas par cas.

En ce qui concerne spécifiquement les membres de la famille des bénéficiaires d’une protection internationale, l’Office des étrangers indique généralement sur son site web qu’une demande est acceptée dès lors que les documents suivants sont présentés:

  • un formulaire de demande complété, daté et signé
  • la preuve du paiement des frais de visa, sauf si le/la demandeur·euse en est exempté
  • un document de voyage personnel sur lequel un visa peut être apposé, ou, si le/la demandeur·euse n’est pas en mesure de présenter ce document, toute autre preuve d’identité (ou plusieurs autres preuves d’identité) que l’ambassade ou le consulat belge compétent juge fiable
  • la preuve que le/la demandeur·euse est une personne étrangère protégé·e par la Belgique (reconnaissance du statut de réfugié·e ou octroi de la protection subsidiaire par le CGRA ou le Conseil du contentieux des étrangers)

Une fois la demande introduite au Pakistan, le SPF Affaires étrangères déconseille le retour en Afghanistan pour des raisons de sécurité. Dans ce contexte, il est important de demander en temps utile une prolongation du visa pour le Pakistan, ou pour le pays dans lequel la personne concernée séjourne, en attendant une décision sur la demande de visa. Cela permet d’éviter les problèmes à la frontière lorsque les personnes quittent le pays concerné.

L’Office des étrangers s’efforcerait de traiter les demandes de visa d’Afghan·e·s avec attention et le plus rapidement possible mais, en raison du nombre élevé de demandes, le délai de traitement peut être long. Actuellement, le délai de traitement est d’environ 1 à 2 mois.

Les Afghan·e·s qui ont déjà demandé un visa de regroupement familial ou un visa humanitaire peuvent trouver l’état d’avancement du traitement de leur demande (« Où en est ma demande de visa ? ») sur le sur le site web de l’Office des étrangers.

En l’absence de preuve (suffisante) du lien de parenté dans le cadre d’une demande de séjour, l’Office des étrangers estime alors généralement que la demande est refusée « sous réserve d’un test ADN ». Ainsi, l’Office des étrangers peut proposer un test ADN après un examen complet de la demande de visa, si le/la demandeur·euse de visa ne dépasse pas l’âge légalement fixé pour le regroupement familial et si le reste du dossier est en ordre et ce, afin de permettre au/à la demandeur·euse de prouver le lien de parenté. Le/la demandeur·euse ne peut pas choisir lui/elle-même cette procédure. Si les autres conditions du regroupement familial sont remplies, le visa peut donc être délivré sur la base d’un résultat positif du test ADN.

De plus amples informations sur les test ADN se trouvent sur le site web de l’Office des étrangers.

Compte-tenu de la situation extrêmement préoccupante en Afghanistan, le poste diplomatique belge à Islamabad, après un arrêt temporaire des tests ADN jusqu’au 15 octobre 2021, a mené une opération spéciale afin de prélever un maximum d’échantillons sanguins pour les dossiers qui requéraient un test ADN et qui étaient en règle sur le plan administratif.

Cette procédure a maintenant été abandonnée. Pour faire effectuer un test ADN, le/la demandeur·euse de visa doit prendre rendez-vous avec le partenaire sous-traitant de l’ambassade.

Concernant l’introduction de la demande de visa de regroupement familial

La situation actuelle en Afghanistan rend extrêmement difficile, voire impossible, tant la collecte des documents nécessaires que l’introduction d’une demande de visa auprès des postes diplomatiques belges compétents. Cela impacte le droit au regroupement, car de nombreux délais et des conditions d’âge s’appliquent: si la demande n’est pas présentée à temps, dans certains cas, le droit au regroupement familial n’existera plus ou des conditions plus strictes s’appliqueront. Il est donc nécessaire que la personne concernée explique clairement les difficultés spécifiques ou la situation spécifique de force majeure dans laquelle elle se trouve en cas de dépôt tardif de la demande et qu’elle démontre qu’elle a fait tout son possible pour introduire une demande à temps (c’est-à-dire avant l’expiration d’un délai ou d’une limite d’âge), mais que cela a été impossible ou très difficile pour des raisons indépendantes de sa volonté. Aussi, en l’absence de certains documents requis comme la preuve du lien de parenté, il est recommandé au/à la demandeur·euse de présenter toutes les preuves possibles du lien de parenté et de motiver les raisons pour lesquelles il/elle ne peut pas présenter certains documents. Là encore, la situation générale en matière de sécurité en Afghanistan n’offre pas automatiquement une exemption aux Afghan·e·s.

Dans tous les cas, afin d’éviter qu’un membre de la famille n’ait plus le droit au regroupement familial ou qu’il ne puisse demander le regroupement familial que dans des conditions plus strictes, il est recommandé que cette personne fasse part à temps de son intention de demander un visa de regroupement familial en contactant, par e-mail, le poste diplomatique belge compétente et l’Office des étrangers. Ce faisant, il est important d’expliquer de manière aussi détaillée que possible et de démontrer autant que possible qu’il est impossible de traverser la frontière et d’introduire la demande auprès du partenaire sous-traitant du poste diplomatique belge compétent et impossible de soumettre les documents et d’obtenir les légalisations requis. Dans ce contexte, il est préférable de rassembler et de soumettre tous les documents alternatifs possibles.

Concernant l’appréciation des conditions du regroupement familial

L’Office des étrangers accorde une certaine flexibilité en ce qui concerne les conditions de procédure et l’absence de certains documents requis (comme indiqué plus haut). Toutefois, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit des conditions matérielles de base fixées dans la loi qui doivent dès lors être remplies (revenus suffisants, stables et réguliers ; logement adéquat ; assurance maladie ; absence de danger pour la santé publique, l’ordre public ou la sécurité nationale). Les exceptions légales restent évidemment d’application. Néanmoins, ces conditions ne sont jamais absolues et, dans le cadre de l’analyse des besoins individuels et du test de proportionnalité obligatoire, l’Office des étrangers peut/doit toujours prendre en compte tous les éléments individuels. Par conséquent, il est toujours utile de clarifier la situation individuelle du membre de la famille présent en Belgique (le/la regroupant·e) que du membre de la famille en Afghanistan (le/la regroupé·e) et de l’étayer par des preuves.

Concernant l’appréciation de la demande de visa humanitaire

Un visa humanitaire est délivré dans des situations exceptionnelles. Aucune condition n’a été fixée dans la loi pour l’octroi d’un visa humanitaire. L’Office des étrangers dispose d’une grande marge d’appréciation et évalue chaque demande sur une base individuelle. Un visa humanitaire est donc considéré comme une faveur et non comme un droit. Aussi, il n’existe pas de période de traitement définie par la loi, ce qui signifie qu’il peut parfois s’écouler jusqu’à un an avant qu’une réponse soit donnée à la demande. De plus, comme il n’y a pas de conditions légales, le résultat est incertain. Enfin, les coûts d’une demande peuvent être élevés, car en plus des frais de visa, il faut payer des frais administratifs par adulte.

Dans la pratique, l’Office des étrangers attache de l’importance aux liens particuliers avec la Belgique (liens de dépendance affective et financière) dont des liens de famille “étendus” (en dehors du champ du regroupement familial) ou la situation humanitaire précaire/isolée de la personne en Afghanistan comme le fait d’être un profil “à haut risque” (comme les colloborateur·rice·s avec la Défense ou organisations internationales, journalistes, activistes des droits humains et des droits des femmes, …).

La situation sécuritaire en Afghanistan peut être utilisée comme un argument humanitaire supplémentaire. Il ne suffit pas de faire référence à une situation générale de guerre ou de sécurité. Il est important d’individualiser au maximum cette demande.

En outre, il est tenu compte, dans une mesure plus limitée, de la situation financière de la personne de référence en Belgique, et la capacité du/de la demandeur·euse qui arriverait en Belgique à supporter les coûts. Cela peut être particulièrement décisif lorsque les autres facteurs cités ci-dessus sont moins importants. Cette situation financière peut être démontrée au moyen d’un contrat de travail, de fiches de salaire, d’un contrat de location enregistré, d’une attestation d’assurance maladie, d’une preuve d’intégration, etc.

Indépendamment de la situation sécuritaire actuelle en Afghanistan, certaines situations ont plus de chances de réussir. Il s’agit principalement de membres de la famille qui se situent juste en dehors du champ d’application du droit au regroupement familial, également appelé “regroupement familial élargi“. Les chances de succès sont aussi plus élevées lorsqu’il s’agit de membres de la famille de réfugié·e·s reconnus ou de bénéficiaires de la protection subsidiaire.

La redevance administrative est toujours due, à l’exception des exemptions prévues par la loi. Et, comme expliqué ci-dessus, la demande peut exceptionnellement être déposée auprès d’un poste diplomatique autre que l’ambassade à Islamabad.

Comme il s’agit d’une faveur et non d’un droit et que la procédure est coûteuse et à l’issue incertaine, il est vivement conseillé de faire appel à un·e avocat·e ou à un service d’aide spécialisé afin d’évaluer les chances de succès et de constituer un dossier individuel. 

Une fois le visa accordé, il doit en principe être apposé sur un document de voyage reconnu par la Belgique pour pouvoir se rendre en Belgique. Les personnes pour lesquelles une décision positive a été prise reçoivent un e-mail de l’ambassade de Belgique avec des instructions. Il leur est demandé d’envoyer leur passeport au FedEx de Gerry, avec une réservation de vol à faire 3 semaines après l’envoi du passeport. La réservation du vol est uniquement demandée afin de déterminer la date de début du visa. Ce n’est pas une condition pour la délivrance du visa. Le visa délivré peut être récupéré par un tiers auprès du partenaire sous-traitant de l’ambassade.

En ce qui concerne la durée de validité du visa :

  • Pour les visas déjà délivrés avant la prise de pouvoir par les Talibans, la période de validité de 6 mois s’applique toujours. Cela signifie qu’après l’expiration de la période de 6 mois, le visa expirera et la personne devra présenter une nouvelle demande de visa.
  • Les visas délivrés maintenant restent également valables pendant 6 mois à compter de la date de délivrance. Si la durée de validité du visa risque d’expirer avant que la personne puisse se rendre en Belgique, il est conseillé de prendre contact avec l’ambassade de Belgique qui a délivré le visa.

Un·e demandeur·euse qui n’est pas en possession d’un document de voyage valide peut demander un laissez-passer. Toutefois, ce laissez-passer n’est pas délivré automatiquement. Le/la demandeur·euse doit expliquer pourquoi il/elle ne peut pas produire un document de voyage valide. Ce n’est que si cette explication est crédible que l’Office des étrangers délivrera un laissez-passer.

On ne sait pas encore si les autorités pakistanaises accepteront un laissez-passer belge comme document de voyage valable pour quitter le Pakistan.

En principe, les personnes qui souhaitent quitter le Pakistan doivent présenter les mêmes documents que ceux qu’elles sont tenues de présenter pour entrer au Pakistan. Il s’agit notamment d’un titre de transport en cours de validité avec un cachet d’entrée et un visa en cours de validité. Elles recevront un tampon de sortie au moment de leur départ.

Par conséquent, les personnes qui sont entrées irrégulièrement au Pakistan et qui s’y trouvent toujours illégalement (personnes qui n’ont pas de visa et/ou de tampon d’entrée valide) ne peuvent pas quitter simplement le Pakistan et sont dès lors arrêtées à la frontière lors de leur départ. Ces personnes doivent d’abord régulariser leur séjour au Pakistan. Sur le site web du ministère pakistanais de l’Intérieur, il est possible de demander un permis de sortie. Toutefois, cela nécessite, entre autres, la présentation d’un passeport valide. On ne sait toujours pas s’il existe d’autres possibilités afin de régulariser son séjour au Pakistan (par exemple, sans passeport).

Les autorités iraniennes n’acceptent pas le passeport belge comme document de voyage pour quitter le pays.

3. Situation en Belgique

Politique d’asile - traitement du CGRA

Le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) avait annoncé, le 16 août 2021, une suspension partielle et temporaire de la notification des décisions concernant les ressortissant⋅e⋅s afghan⋅e⋅s ayant demandé l’asile en Belgique, dans un premier temps, jusque fin septembre 2021.

Cette suspension a ensuite été prolongée jusqu’au 15 novembre puis jusqu’au 4 janvier 2022, en raison du manque d’informations nécessaires sur la situation sécuritaire en Afghanistan. Dans une communication du 6 janvier 2022, le CGRA a annoncé qu’il disposait de davantage d’informations et que la suspension temporaire de l’évaluation du statut de protection subsidiaire sera levée avant la fin du mois de janvier 2022.

La fin de la suspension   a finalement été annoncée le 2 mars 2022. Après plus de six mois de gel, le CGRA a donc repris l’examen complet des demandes de protection internationale des ressortissant·e·s afghan·e·s. Les entretiens au CGRA n’ayant pas été suspendus, un nombre important de personnes pour lesquelles un entretien a déjà eu lieu devraient recevoir prochainement une décision sur leur demande.

De manière  générale, le CGRA reconnait que: “la situation dans ce pays est extrêmement problématique. Il est évident que de nombreuses personnes ont un besoin de protection. Toutefois, ce n’est pas nécessairement le cas de toutes. Un examen individuel reste nécessaire.”

Concernant le statut de réfugié·e

La reconnaissance du statut de réfugié·e n’a jamais été interrompue et se poursuit donc. Le CGRA précise clairement que la situation en Afghanistan s’est dégradée depuis la prise de pouvoir des Talibans et que de nombreuses personnes risquent d’être persécutées. Le CGRA identifie ainsi différents profils à risque susceptibles d’obtenir un statut de réfugié: les journalistes, les militant·e·s des droits humains (dont les droits de femmes), les opposant·e·s politiques, les personnes ayant critiqué les Talibans, les personnes ayant exercé certaines fonctions sous le gouvernement précédent, certain·e·s collaborateur·rice·s des forces internationales ou organisations qui étaient présentes dans le pays, les personnes LGBTQI+ et autres personnes qui vont à l’encontre des normes et valeurs conservatrices ou religieuses, les mineurs non accompagnés ou les femmes ne disposant pas d’un réseau familial ou social, les membres de la famille de certains profils à risque.

Cette liste n’est pas exhaustive: ce n’est pas parce qu’un·e ressortissant·e afghan·e ne s’y retrouve pas qu’il/elle ne pourra pas se voir reconnaître un statut de réfugié. À l’inverse, être repris dans un de ces profils à risque donne des chances importantes d’obtenir un statut de réfugié mais cela ne sera pas automatique. Chaque demande de protection continuera d’être examinée sur base individuelle, au cas par cas.

Concernant la protection subsidiaire

Toute demande de protection internationale qui ne permet pas de remplir les conditions d’obtention du statut de réfugié·e doit être analysée sous l’angle de la protection subsidiaire.Avant la prise de pouvoir des Talibans, ce statut était octroyé en raison du conflit armé qui sévissait en Afghanistan, avec de nettes différences en fonction des régions d’origine des demandeur·euse·s de protection afghan·e·s. Or, depuis la prise de pouvoir des Talibans et avec le retrait de la coalition internationale, la situation sécuritaire du pays a fortement changé. C’est ce changement sécuritaire, extrêmement volatile, et sa prise en compte dans l’évaluation du besoin de protection qui ont contraint le CGRA à geler l’examen complet des demandes de protection internationale pour les Afghan·e·s pendant plus de six mois.

  • Concernant la protection subsidiaire sous l’angle du risque de peine de mort ou d’exécution (article 15, a) de la Directive 2011/95/UE dite Directive “Qualification”):

D’après nos informations, le CGRA considère que le risque d’être condamné·e à une peine de mort en Afghanistan est limité. Le CGRA n’écarte pas systématiquement le besoin de protection sur cette base mais il sera nécessaire de démontrer, avec preuves diverses à l’appui, que le/la demandeur·euse de protection encourt un risque réel d’être condamné·e à mort ou exécuté·e en cas de retour en Afghanistan.

  • Concernant la protection subsidiaire sous l’angle du risque de torture ou de traitements inhumains ou dégradants (article 15, b) de la Directive 2011/95/UE dite Directive “Qualification”):

A l’instar du risque d’être condamné·e à mort en Afghanistan et d’après nos informations, le risque d’être victime de torture ou de traitement inhumain ou dégradant en cas de retour en Afghanistan ne sera que peu reconnu par le CGRA. Il sera toujours possible d’obtenir une protection subsidiaire si un tel risque pouvait être établi mais cela ne devrait concerner que peu de cas.

Par ailleurs, au regard de la très grave situation humanitaire en Afghanistan depuis la prise de pouvoir des Talibans et l’arrêt de l’aide internationale, le CGRA s’est longuement questionné sur les possibilités d’obtention d’une protection subsidiaire pour les Afghan·e·s sur cette base. Sa position est désormais clairement établie : “En règle générale, le statut de protection subsidiaire ne sera pas octroyé en raison des conditions socioéconomiques ou humanitaires prévalant dans ce pays.”

Le contexte humanitaire difficile et la famine sévissant dans le pays du fait de la sécheresse ne constitueront donc pas, à eux seuls, des éléments permettant d’obtenir une protection de la part du CGRA.

  • Concernant la protection subsidiaire sous l’angle du risque de menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international (article 15, c) de la Directive 2011/95/UE dite Directive “Qualification”):

Cette dernière hypothèse d’obtention de la protection subsidiaire est désormais complètement écartée par le CGRA pour les Afghan·e·s.

Auparavant, c’est sur cette base que de nombreux·ses afghan·e·s obtenaient, à côté du statut de réfugié, une protection internantionale. La guerre civile faisant rage principalement entre Talibans et forces armées (afghanes et de la coalition internationale), les civils, en fonction de leur région d’origine, pouvaient obtenir une protection car risquant leur vie dans le cadre d’un conflit armé sans devoir démontrer qu’ils/elles étaient ciblé·e·s individuellement.

Or, d’après le CGRA et sur base de différents rapports internationaux, il n’y a désormais plus de conflit ouvert en Afghanistan. Le CGRA estime avoir une vue claire sur cette situation sécuritaire et affirme que: “L’on  n’observe plus de risque réel d’être victime d’une violence aveugle en Afghanistan” et en tire comme conclusion que: “le statut de protection subsidiaire ne sera plus octroyé en raison de la situation sécuritaire“.

En résumé

Le CGRA estime que la situation en Afghanistan est problématique. Le statut de réfugié·e sera, d’après le CGRA, reconnu plus largement que par le passé. En revanche, le CGRA estime qu’il y a moins de raisons d’accorder la protection subsidiaire du fait d’un changement important de la situation sécuritaire depuis la prise de pouvoir des Talibans (plus de  risque de subir des violences aveugles en raison d’un conflit armé).

/!\ Les demandeur·euse·s débouté·e·s de leur demande ont le droit d’introduire un recours contre la décision négative du CGRA qui leur est notifiée. Contre un refus au fond (refus du statut de réfugié·e et refus du statut de protection subsidiaire), le délai pour introduire le recours au Conseil du contentieux des étrangers (CCE) est de 30 jours calendrier.

Concernant la recevabilité des demandes ultérieures

Le CGRA a également repris, depuis le 2 mars 2022, les notifications des décisions d’irrecevabilité pour les demandes de protection ultérieures (demandes multiples).

Concrètement, un·e ressortissant·e afghan·e ayant déjà introduit par le passé au moins une demande de protection internationale clôturée définitivement avant la prise de pouvoir des Talibans, doit passer un filtre de recevabilité au niveau du CGRA. Cela signifie que le CGRA, avant d’examiner au fond si une personne rentre bien dans les critères du statut de réfugié ou de protection subsidiaire, analysera d’abord si des “éléments nouveaux” pertinents (c’est-à-dire de nature à augmenter significativement la probabilité d’obtenir un statut de protection internationale) sont soulevés par le/la demandeur·euse de protection par rapport à sa demande précédente.

/!\ Ce filtre a des conséquences importantes: si le/la demandeur·se de protection ne peut apporter des “éléments nouveaux” (au sens de la loi) susceptibles de changer la décision du CGRA alors, sa demande sera jugée non recevable et l’instance d’asile n’examinera même pas l’ensemble des éléments invoqués au fond.

Le CGRA est ainsi très clair quant aux nouveaux éléments à invoquer : la simple mention de changement de régime ou de la situation sur place en Afghanistan – c’est-à-dire de prise de pouvoir total du pays par les Talibans et de la situation humanitaire – ne constitue pas un élément suffisant que pour dépasser ce filtre de recevabilité.

/!\ Il est donc très important, pour toute personne ayant déjà introduit une demande de protection par le passé, d’apporter des éléments nouveaux.

Il est également important de tenter de démontrer que les Talibans au pouvoir représentent, pour le/la demandeur·se de protection, un élément susceptible de changer, en ce qui la concerne personnellement, son besoin de protection internationale.

/!\ Les demandeur·euse·s débouté·e·s de leur nouvelle demande ont le droit d’introduire un recours contre la décision négative du CGRA qui leur est notifiée. Contre une décision d’irrecevabilité (par ex. demande ultérieure/multiple), le délai de recours est de 10 jours calendrier.

Il importe dès lors que les personnes déjà présentes sur le territoire et ayant déjà été déboutées de l’asile prennent contact avec un·e avocat·e ou un service spécialisé afin de préparer au mieux la présentation de leur nouvelle demande d’asile.

Dans ce contexte, le CIRÉ et Vluchtelingenwerk Vlaanderen ont, en date du 30 août 2021 et afin de soutenir par écrit la prise en considération des demandes de protection internationale ultérieures d’Afghan·e·s, élaboré un modèle-type (en français et néerlandais) pour les avocat·e·s pouvant être adapté sur base du profil personnel du/de la demandeur·euse et nécessitant d’être mis à jour sur base de l’actualité sécuritaire en Afghanistan.

Notons également que dans l’hypothèse où le CGRA ne déclarerait pas la demande ultérieure comme étant recevable – faute d’éléments nouveaux – Fedasil a confirmé sa politique habituelle: sauf cas exceptionnel, il ne sera fourni un accueil matériel (Code 207) au/à la demandeur·euse que si la nouvelle demande de protection est déclarée recevable par le CGRA. Ce qui est assez problématique concernant le droit à l’accueil des personnes concernées.

Un jugement du Tribunal du travail de Bruxelles du 23 décembre 2021, dans un dossier individuel, a été rendu et accorde une place d’accueil à un demandeur de protection afghan (3e demande d’asile). Dans ce jugement, le Tribunal a jugé que la décision de Fedasil de limiter “machinalement” le droit à l’accueil à l’aide médicale (« no show ») contrevient à la règle d’un accueil conforme à la dignité humaine pour tout·e·s les demandeur·euse·s d’asile, sur base d’un examen individuel et compte-tenu du principe de proportionnalité. L’exception pour les demandes ultérieures, prévue dans la loi, n’existe que pour éviter les abus. Vu le changement de situation majeur en Afghanistan, la demande ultérieure aurait, selon le Tribunal, prima facie, davantage de chances d’aboutir à une décision favorable. Il ne peut dès lors être conclu que la demande ultérieure a été introduite dans le seul but d’obtenir ou de maintenir l’aide matérielle. Le demandeur a donc bien droit à l’accueil matériel de la part de Fedasil jusqu’à ce qu’une décision soit prise par le CGRA ou, en cas de recours, par le CCE, sur la recevabilité de sa demande d’asile.

Perspectives

EASO (le Bureau européen d’appui en matière d’asile) a publié le 11 novembre 2021 un “Country Guidance Afghanistan 2021“. Il s’agit d’une première analyse commune des États membres de l’Union européenne sur la situation en Afghanistan, au regard de la législation européenne applicable en matière de protection internationale.

EASO a complété cette première analyse d’une seconde, publiée le 10 janvier 2022, intitulée “Afghanistan country focus“. Ce rapport couvre les premiers développements depuis la prise de pouvoir par les Talibans, à savoir la formation du gouvernement, l’élaboration et la mise en œuvre des politiques, ainsi que la situation sous le régime des Talibans pour la population générale et pour certains groupes ou profils spécifiques. La situation sécuritaire sur place  et la violence liée aux groupes d’insurgés, au terrorisme et à des éléments similaires ont également été inclus, ainsi que des informations sur la situation humanitaire générale.

Politiques de retour

Le secrétaire d’État à l’asile et à la migration a annoncé le 16 août dernier via la presse que, pour l’instant, il n’y aura pas de retours forcés en Afghanistan des demandeur·euse·s de protection internationale débouté·e·s. Sur base des prolongations de la suspension des demandes de protection internationale au CGRA, ce gel provisoire était de fait toujours maintenu. Il ne s’agit pas officiellement d’un moratoire, mais d’un gel provisoire des retours forcés, puisque la situation actuelle les rend impossibles. Notons également que, sur base des informations dont nous disposons, plus aucune personne afghane ne se trouve actuellement détenue en centre fermé en vue d’une expulsion vers l’Afghanistan.

Depuis la reprise totale des examens de protection par le CGRA, nous attendons cependant une communication officielle de l’Office des Étrangers quant à la suspension des retours forcés de ressortissant·e·s afghan·e·s. Actuellement les retours forcés n’ont toujours pas repris, parce qu’impossibles à mettre en œuvre en pratique.

Dans le même sens, l’OIM et Fedasil ont également informé, dès la prise de pouvoirs des Talibans, qu’il n’était actuellement plus possible de procéder à des retours volontaires vers l’Afghanistan.

Notons qu’actuellement, les transferts Dublin ne seraient pas suspendus par principe par l’État belge pour les demandeur·euse·s afghan·e·s.

4. Position du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR)

Le HCR avait publié, dès le 17 août 2021, une note de position sur les retours vers l’Afghanistan, appelant les États à suspendre les retours forcés vers l’Afghanistan compte-tenu de la situation mouvante et incertaine. Le HCR demandait alors, entre autres, à chaque pays de permettre aux réfugié·e·s afghan·es d’accéder à son territoire et de respecter le principe de non-refoulement à tout moment.

Le 7 février 2022, le HCR a pris une nouvelle position, intitulée « Guidance note on the international protection needs of people fleeing Afghanistan ». Cette nouvelle note vient remplacer la position du HCR quant au retour d’août 2021 ainsi que les « Eligibility Guidelines for Assessing the International Protection Needs of Asylum-Seekers from Afghanistan» qui dataient d’août 2018 (il s’agit de recommandations sur le besoin de protection à l’égard des autorités et des instances d’asile).

Le HCR revient ainsi sur le besoin de protection des ressortissant·e·s afghan·e·s en réitérant l’appel adressé aux États dans sa note d’août 2021 demandant de permettre l’accès à leur territoire aux afghan·e·s, de garantir le droit à pouvoir introduire une demande de protection internationale et d’assurer le non-refoulement des Afghan·e·s. Le HCR estime également que la situation en Afghanistan renforce les besoins de protection pour les personnes fuyant le pays. Les possibilités d’« alternative de fuite interne » ne peuvent toujours pas être utilisées pour refuser la protection. Enfin, le HCR souhaite que la situation humanitaire désastreuse en Afghanistan n’obscurcisse pas les situations de violations des droits humains sur place. Les États doivent ainsi garantir que les demandeur·se·s d’asile afghan·e·s puissent fournir un rapport complet des raisons les ayant poussé·e·s à fuir leur pays d’origine, y compris concernant les craintes qu’ils/elles auraient en cas de retour sur place.

Le HCR enjoint également les États à ne plus prendre que des décisions de reconnaissance du statut de réfugié et à suspendre toute décision rejetant les demandes d’asile des ressortissant·e·s afghan·e·s dans le contexte actuel. Le HCR se base sur la situation sur place en estimant ne pas disposer d’assez d’éléments factuels permettant d’établir une absence de reconnaissance du statut de réfugié, le degré de certitude requis pour prendre une telle décision de refus de protection n’étant pas atteint.

Concernant la recevabilité des demandes ultérieures, le HCR estime que le filtre de la recevabilité devrait pouvoir être dépassé pour toute demande d’asile d’Afghan·e·s, la prise de pouvoir des Talibans étant, par nature, un élément nouveau susceptible, à lui seul, de permettre la reconnaissance d’un besoin de protection internationale. Les personnes ayant déjà introduit une demande d’asile avant le 15 août 2021 doivent également avoir la possibilité de fournir des informations complémentaires à l’appui de leur demande. En tout état de cause, au niveau de l’accueil, le HCR demande aux États de fournir un abri, une aide médicale et un support pour rencontrer tous les besoins fondamentaux des demandeur·eus·s d’asile afghan·e·s (et ce qu’il s’agisse d’une première demande ou d’une nouvelle demande d’asile).

Concernant le regroupement familial, le HCR exhorte les États à faciliter les procédures. Le HCR appelle ainsi les pays à prendre en compte les contraintes auxquelles les réfugié·e·s peuvent être confrontés pour pouvoir satisfaire aux exigences administratives imposées pour l’introduction d’une demande de protection internationale. Il propose d’adopter une approche plus pragmatique et plus souple, notamment en recourant à des méthodes de traitement innovantes et à des entretiens à distance.

Enfin, le HCR rappelle avec vigueur sa demande adressée aux États de ne pas renvoyer de force des afghan·e·s en Afghanistan. Il appelle également les États à ne pas expulser des Afghan·e·s vers les pays limitrophes à l’Afghanistan, comme l’Iran ou le Pakistan, qui accueillent déjà un nombre important de réfugié·e·s.

5. Informations supplémentaires

L’ambassade de Belgique à Islamabad tente actuellement d’aider les profils cités plus haut et qui peuvent bénéficier d’une assistance belge de la manière la plus appropriée. Vu le nombre d’appels téléphoniques et d’e-mails reçus, les délais de réponse sont toutefois assez importants. Si les personnes ont déjà contacté l’ambassade et que leurs coordonnées ont été enregistrées, leur demande fera en principe l’objet d’un suivi. Il n’est pas nécessaire d’envoyer un rappel sauf si les personnes disposent de nouvelles informations les concernant. Il est important de suivre l’évolution de la situation notamment sur le site de l’ambassade: https://pakistan.diplomatie.belgium.be/fr.

A noter également que les personnes en Belgique qui résident à Bruxelles ou en Wallonie et qui n’ont plus de nouvelles de leur famille encore en Afghanistan, peuvent s’adresser au Service Rétablissement des Liens Familiaux de la Croix-Rouge (Tracing), durant les permanences téléphoniques du lundi au jeudi de 9h00 à 12h30: 02/371.31.58 ou 081/77.16.48 ou par mail à l’adresse service.rlf@croix-rouge.be.

Les Afghan·e·s qui se trouvent en Afghanistan et dans les environs et qui recherchent de l’aide et/ou des informations peuvent également contacter le HCR Afghanistan:

  • via la ligne d’assistance téléphonique “Protection” au numéro 0790691746 ou 0704996168 (accessible tous les jours ouvrables), ou
  • via l’adresse électronique “Protection”: afgkaprt@unhcr.org.

Le HCR rassemble également des informations et des liens importants et utiles, pays par pays, sur ses pages web “help” pour les personnes ayant besoin d’assistance. En réponse à la situation en Afghanistan, le HCR a mis en place les pages web “Help Afghanistan” et “Help Pakistan“. Ces pages web seront régulièrement mises à jour par le HCR.

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