Contrairement aux étrangers en général, les réfugiés ont dû rompre les liens avec leur pays d’origine. À cause d’un exil souvent long et des traumatismes que beaucoup d’entre eux ont subis, les réfugiés rencontrent des difficultés à répondre aux exigences légales pour obtenir la nationalité du pays d’asile. C’est pourquoi le HCR plaide pour un traitement plus favorable vis-à-vis des réfugiés en matière d’accès à la nationalité.
L’ancienne loi prévoyait des dispositions particulières pour les réfugiés reconnus souhaitant acquérir la nationalité belge. La nouvelle loi ne le permet plus. Quelle est la position du HCR à ce sujet?
Les réfugiés ne fuient pas leur pays par libre choix. Ils doivent tout laisser derrière eux du fait de la guerre et des persécutions. Cela signifie que, contrairement aux étrangers en général, ils ont dû rompre les liens avec leur pays d’origine. Pour nombre de réfugiés, l’exil est susceptible d’être long ou parfois même sans fin. Pour ces raisons et aussi à cause des traumatismes que beaucoup d’entre eux ont subis, les réfugiés rencontreront souvent des difficultés à répondre aux exigences légales posées aux étrangers en général pour obtenir la nationalité du pays d’asile. C’est pourquoi le HCR plaide pour un traitement plus favorable vis-à-vis des réfugiés en matière d’accès à la nationalité.
Pour les réfugiés, la possibilité d’acquérir la nationalité belge forge un lien juridique et psychologique fort entre eux et leur nouveau pays d’accueil. Pour ceux qui ne peuvent pas retourner dans leur pays d’origine, l’accès à la nationalité de leur nouveau pays d’accueil est un espoir légitime. Cependant, les procédures par lesquelles ils doivent passer peuvent prendre des années et peuvent avoir un impact important sur leurs chances d’intégration. Maintenir des réfugiés dans un tel état temporaire n’est pas seulement improductif tant pour eux-mêmes que pour la société, ce n’est simplement pas humain. En ce sens, l’accès à la nationalité belge est un élément important dans la recherche de solutions durables au sort des réfugiés en Belgique.
Il s’agit non seulement d’une obligation morale, mais aussi d’une obligation légale. Le fait d’offrir dans la mesure du possible un traitement favorable aux réfugiés en termes d’accès à la nationalité – comme ce fut le cas en vertu de la précédente loi sur la nationalité – est prescrit par l’article 34 de la Convention de Genève de 1951 à laquelle la Belgique est partie.
La Belgique n’a-t-elle pas une obligation morale de faciliter l’accès à la nationalité belge pour les réfugiés présents sur son territoire?
Il s’agit non seulement d’une obligation morale, mais aussi d’une obligation légale. Le fait d’offrir dans la mesure du possible un traitement favorable aux réfugiés en termes d’accès à la nationalité – comme ce fut le cas en vertu de la précédente loi sur la nationalité – est prescrit par l’article 34 de la Convention de Genève de 1951 à laquelle la Belgique est partie.
En supprimant cet accès facilité, la loi du 4 décembre 2012 nous inquiète. Généralement, dans d’autres pays européens, un tel accès facilité à la nationalité pour les réfugiés existe. La Belgique ne devrait pas s’isoler sur cette question.
À ce propos, le HCR recommande la même approche pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire – qui sont dans une situation similaire à celle des réfugiés – et également pour les apatrides. Le HCR se félicite donc que la loi sur la nationalité adoptée récemment maintienne un accès accéléré à la naturalisation pour les apatrides.
En pratique, quelles sont les conséquences de la nouvelle loi sur la nationalité pour les personnes relevant du mandat du HCR (réfugiés, demandeurs d’asile et apatrides)?
La pratique nous le dira. À ce stade, nous craignons que la loi ait un impact négatif sur les réfugiés. La loi prolonge en effet la période d’attente pour obtenir la nationalité belge de deux à cinq voire dix ans de résidence légale, en fonction des circonstances de l’individu. Or, on s’attend à ce qu’un nombre relativement important de réfugiés ne soit pas en mesure de remplir les conditions requises pour obtenir la nationalité après cinq ans de séjour légal en Belgique. En outre, il est à craindre que la période s’étendant de la demande d’asile à la reconnaissance du statut de réfugié ne soit plus prise en compte dans le calcul de la durée de résidence légale précédant la demande de la nationalité belge. Comme la procédure d’asile peut parfois prendre plusieurs années, les réfugiés vont très probablement connaître des délais supplémentaires pour accéder à la nationalité belge.
Propos recueillis par Grégoire Comhaire