Relocalisation des demandeurs de protection: l’imposture de la solidarité – CP

 Il y a exactement deux ans, l’Union Européenne mettait en œuvre le “plan de relocalisations” des demandeurs de protection internationale venant de Grèce et d’Italie. Un système de solidarité entre les États membres, auquel la Belgique a participé. Chichement. Froidement. En poursuivant les renvois de demandeurs d’asile vers ces deux pays dont elle se disait solidaire…

Le plan fixait que les États membres devaient, dans un délai qui se termine aujourd’hui, prendre à leur charge 160.000 demandeurs de protection se trouvant en Italie et en Grèce. Cet engagement a été réduit en 2016, la Commission européenne ayant fixé de nouveaux objectifs minimum, bien inférieurs à ceux initialement prévus (98.000). Selon le premier plan de relocalisations, 3.812 personnes auraient dû être prises en charge par la Belgique, ce nombre passant à 1.530 dans sa deuxième version. Il faut savoir en outre que le mécanisme de relocalisations ne prend en compte que les ressortissants de pays pour lesquels la protection est accordée dans l’UE à 75% au moins. C’est-à-dire, en fait, principalement les Syriens et les Érythréens. Qu’en est-il, entre autres, des Soudanais, des Afghans, des Irakiens, des Somaliens qui, on le sait, fuient des situations particulièrement dramatiques?

Considérant n’être lié que par les objectifs minimum fixés en 2016, le gouvernement belge estime avoir rempli ses obligations en ayant accueilli à ce jour 997 personnes. C’est bien. Mais il s’était engagé à en relocaliser bien plus, et il aurait pu le faire.

La diminution des objectifs et la position minimaliste de la Belgique en la matière sont en décalage total avec les besoins réels des demandeurs de protection. Début septembre, la Commission européenne signalait qu’il restait encore des demandeurs de protection en Italie et en Grèce pouvant être relocalisés, contrairement à ce que prétend le Secrétaire d’État à l’asile et à la migration. Elle rappelait aussi que l’Italie et la Grèce voient arriver chaque jour des personnes susceptibles de bénéficier de ce programme, et que les États membres pouvaient s’engager à dépasser leurs quotas minimum. Ce 26 septembre, le Comité anti-torture (CPT) du Conseil de l’Europe publie un rapport qui dénonce les conditions “sordides” dans lesquelles sont maintenus des milliers de migrants en Grèce : insalubrité, surpeuplement, violences, détention d’enfants…

La solidarité ne serait-elle qu’une question de quotas, de critères qu’il s’agit de remplir de la façon la plus infime? Peut-on accepter que soient réduites à des coefficients les personnes en quête de protection? Qu’elles soient l’objet d’un jeu cynique par lequel la Belgique se targue de respecter les “obligations européennes” de relocalisation, tout en renvoyant vers l’Italie et la Grèce des demandeurs d’asile pris dans le système Dublin, alors qu’elle a la faculté de ne pas l’appliquer systématiquement? Est-ce là ce que le gouvernement entend par solidarité entre États membres?

Le CIRÉ ne peut que constater que les priorités du gouvernement sont autres : arrestations en masse de migrants, détention en centres fermés de ressortissants de pays non sûrs, appel aux autorités soudanaises pour identifier ses ressortissants au mépris du respect de leurs droits, expulsions, renvois de demandeurs d’asile vers l’Italie et la Grèce en vertu des accords de Dublin…

Oui, la Belgique a (presque) respecté ses engagements en relocalisant 997 personnes.
Elle se pose ainsi en froide comptable de la solidarité.

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