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Opinion- Crise de l'accueil des demandeurs d'asile: Bis Repetita!

La situation dans le réseau d’accueil des demandeurs d’asile est catastrophique. Conséquence de plus en plus de demandeurs d’asile parmi lesquels des enfants se retrouvent à la rue sans accompagnement social, juridique et médical. Si rien ne bouge pour cet hiver, la Belgique pourrait bien revivre une nouvelle catastrophe humanitaire comme celle qu’elle a connu l’année dernière. Face à l’inertie du gouvernement dans ce dossier, le CIRÉ a adressé une lettre aux membres du gouvernement actuel mais aussi au formateur du prochain gouvernement. Une opinion parue dans la Libre Belgique du 21 septembre 2012.

Dur constat que celui d’un retour à la case départ : oui, la crise de l’accueil des demandeurs d’asile redémarre. Et oui, c’est insupportable. Pour vous, membres du gouvernement et formateur, pour nous et pour les demandeurs d’asile. Pourtant, vous avez l’impression d’avoir tout fait pour en sortir. Vous avez pris de multiples mesures afin de libérer des places d’accueil et d’échapper à l’engorgement : certaines très bonnes, d’autres moins bonnes et d’autres encore, contestables. Nous avons craint que ces mesures ne soient pas suffisantes, convaincus que la véritable solution était ailleurs.

Et, aujourd’hui, nos craintes se vérifient. Depuis début septembre, près de 600 personnes ayant introduit une demande d’asile n’ont pas reçu de place d’accueil et ont été laissées à la rue. Depuis le début de l’année, ils sont plus de 2000 demandeurs d’asile – hommes, femmes, enfants – à s’être retrouvés dans cette situation, puis à s’être vus refuser l’aide sociale par les CPAS, en raison d’un manque de moyens et du refus de prendre des responsabilités qui – en théorie – ne leur incombent pas. Malgré tous les efforts réalisés dont nous reconnaissons l’ampleur, la Belgique ne peut s’en tenir à cela, car elle a ici une obligation de fin et non de moyens. La seule mesure capable de résoudre la crise de l’accueil de manière efficace, juste et durable, est la mise en œuvre du plan de répartition. Nous vous l’avons répété inlassablement, non par entêtement ou par manque d’imagination, mais par conviction qu’il s’agit de la seule véritable solution. Et vous le savez aussi bien que nous mais, pour des raisons politiques, n’avez pas opté pour cette voie.

Alors aujourd’hui, vous êtes devant un choix important :

  1. Soit opter pour le déni du droit : renoncer à résoudre la crise et assumer le non-respect par l’Etat belge de ses engagements et obligations légales – nationales et internationales. Ce qui revient, indirectement, à dénier la Convention de Genève et à assumer la responsabilité d’une éventuelle crise humanitaire cet hiver, d’autant plus inacceptable qu’elle aurait pu être évitée.
  2. Soit opter pour la solution “pansement” : trouver, dans l’urgence, des réponses bricolées et de court terme au manque de places. Des réponses qui résoudront le problème dans l’immédiat mais ne l’empêcheront pas de resurgir en boucle ensuite. Et qui risquent de coûter, politiquement et financièrement, bien plus cher que l’option que nous préconisons.
  3. Soit enfin, opter pour une solution durable : oser le plan de répartition comme mesure exceptionnelle de sortie de crise. Cette mesure consiste à faire passer en aide financière, auprès des CPAS, des personnes qui sont déjà dans le réseau d’accueil depuis un certain temps – et qui sont toujours en procédure d’asile. De nombreuses places seraient ainsi libérées pour accueillir les demandeurs d’asile primo-arrivants. Et le poids de l’aide à accorder serait réparti équitablement entre l’ensemble des CPAS du pays. Une solution, qui plus est, moins coûteuse que l’aide matérielle et plus acceptable pour les populations locales.Si le gouvernement persiste à poursuivre sur la voie du “pansement”, alors, pour éviter une nouvelle crise humanitaire cet hiver, nous lui demandons de prendre, dès à présent, les dispositions nécessaires, à savoir :
  • ouvrir d’urgence des nouvelles places d’accueil, avec la garantie d’un accompagnement socio-juridique de qualité,
  • reprendre dans le réseau d’accueil tous les non-désignés qui n’ont pas pu trouver de solution auprès d’un CPAS, de manière à éviter le passage par les tribunaux du travail et l’imposition d’astreintes, très mal perçues par l’opinion publique,
  • évaluer le renforcement des instances d’asile et, s’il est encore insuffisant, leur donner les moyens nécessaires pour qu’elles puissent résorber leur arriéré au plus vite.

En attendant la mise en œuvre de ces mesures et tant qu’elles ne seront pas effectives, nous continuerons d’aider les personnes non désignées à faire valoir leurs droits. Nous continuerons aussi à sensibiliser l’opinion publique sur les conséquences de ce non-accueil, ainsi que sur les raisons profondes et les enjeux des manquements de notre gouvernement à ses missions légales et sociales.

Contact presse
Frédérique Mawet, Directrice du CIRÉ, +32 2 629 77 35

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