Le projet de réforme du système d’aide juridique auquel se prépare le gouvernement Di Rupo, annoncé récemment dans une note de la Ministre Turtelboom, suscite auprès du CIRÉ les plus vives préoccupations. Le CIRÉ s’inquiète des mesures proposées, car elles réduisent l’accès à l’aide juridique et donc, à la justice, pour son public ainsi que pour l’ensemble des populations précarisées de notre société.
Les réformes annoncées consistent, d’une part, à durcir les conditions d’accès à l’aide juridique (instauration d’un ticket modérateur, exigence de preuves de l’indigence) et, d’autre part, à réduire la rémunération des avocats prestant ce service (mise en place d’un numérus clausus, réduction de l’indemnisation par procédure). De telles mesures auront pour conséquence de rendre l’aide juridique difficilement accessible pour les personnes les plus démunies financièrement. Pour celles qui pourraient passer ce filtre, elles risquent de réduire leurs chances de trouver un avocat disposé à leur fournir cette aide. Et pour l’ensemble des bénéficiaires, cette réforme risque fort de diminuer la qualité des services prestés.
Ce qui se joue aujourd’hui est bien plus large que le niveau de rémunération des avocats « pro deo » ou les éventuels abus du système. À travers la réforme proposée, la Ministre Turtelboom touche à l’accès à la justice pour tous. Il s’agit non seulement d’un droit fondamental, reconnu par la CEDH (art. 6) et par notre Constitution (art. 23). Mais aussi d’un pilier de notre démocratie : une société où toute personne n’a pas droit à la défense et à faire valoir ses droits, est une société qui donne place à plus de violences et plus d’inégalités. Et ce, plus encore en temps de crise comme aujourd’hui.
Si l’on veut garantir le droit à la justice pour tous, l’accès à l’aide juridique gratuite pour les personnes ne pouvant pas se l’offrir doit être sauvegardé.
Le CIRÉ est conscient de la nécessité de repenser et d’améliorer le système d’aide juridique. Il est aussi convaincu que des solutions existent et ce, ailleurs que dans les poches des personnes qui devraient pouvoir bénéficier de cette aide, et ailleurs que dans la réduction des moyens accordés à ce système. Il est aussi conscient qu’il s’agit d’une question complexe, qui ne peut être réglée de manière précipitée et qui mérite une concertation avec tous les secteurs concernés.
Le CIRÉ soutient le signal d’alarme donné le vendredi 1er février dans Le Soir par un collectif de citoyens, d’associations et de syndicats, ainsi que leur appel lancé à l’ensemble de la société civile, des barreaux et du monde politique, à s’opposer aux projets du gouvernement Di Rupo, qui – en s’attaquant à un droit fondamental – nous concerne tous.
Découvrez la carte blanche parue dans le Soir du vendredi 1er février 2013