Centres fermés: stop ou encore?

En lisant ce numéro, il n’y a plus aucun doute: la politique d’enfermement des étrangers est coûteuse. Coûteuse sur le plan humain comme sur le plan financier. Et pour une utilité qui n’est nulle part démontrée.

Passons donc rapidement en revue les différents critères explicites et implicites à l’aune desquels on pourrait mesurer l’efficacité de cette politique. Le premier critère, officiel, est que l’on détient dans le but d’expulser. Pourtant à peine 32% des personnes enfermées ou arrêtées sont expulsées, ce qui remet en question le principe même de cette politique.

Le deuxième critère, officieux celui-là, est que l’existence des centres fermés aurait un effet dissuasif auprès des clandestins potentiels. Mais là encore, si l’on examine sérieusement la force des effets pull et push et les risques que les migrants n’hésitent pas à prendre au péril de leur vie pour atteindre l’Europe, on ne peut pas sérieusement penser que l’expérience de l’enfermement, aussi pénible et violente soit-elle, dissuade qui que ce soit de tenter sa chance.

Reste alors un troisième critère, probablement le plus important aux yeux de l’État: l’existence des centres fermés, avec l’enfermement et l’expulsion d’une toute petite partie des migrants en séjour irrégulier, a pour but de donner un signal d’apparente maîtrise du territoire par l’État, signal qui serait destiné à rassurer les citoyens…

Oser ouvrir un espace de débat

Actuellement, l’enfermement fait partie intégrante du dispositif “gestion des flux migratoires” mis en place par nos États. À la décharge de nos responsables politiques, changer de paradigme et penser la question des flux migratoires autrement n’est pas un exercice facile.

Pourtant, nos responsables politiques ne peuvent l’ignorer, ce mode de gestion ne sera pas tenable à terme. Il va falloir – bon gré mal gré – évoluer vers une nouvelle forme de gouvernance mondiale qui devra trouver un nouvel équilibre, plus juste, entre les intérêts des populations du Nord et du Sud. Les États ne pourront pas éternellement laisser les puissances économiques mener la danse au nom du seul profit et au mépris des intérêts des populations.

Dans l’intervalle, il ne serait pas compréhensible ni acceptable que nos États, ici l’État belge, n’apportent pas au dispositif actuel d’enfermement et d’expulsion des correctifs minimaux. À court terme, il faudra suivre à tout le moins les recommandations du Médiateur fédéral et du Comité contre la torture des Nations unies pour respecter les droits élémentaires des personnes détenues.

Soit:

  1. Garantir aux “détenus” l’accès à une aide juridique indépendante et à une commission des plaintes indépendante et effective.
  2. Effectuer un meilleur contrôle de la détention qui vérifie que son usage correspond bien au sens de la loi, à savoir une “mesure de dernier ressort”.
  3. Renforcer les contrôles externes sur les éloignements.
  4. Développer le suivi des personnes expulsées.

Actuellement, l’enfermement fait partie intégrante du dispositif “gestion des flux migratoires” mis en place par nos États. À la décharge de nos responsables politiques, changer de paradigme et penser la question des flux migratoires autrement n’est pas un exercice facile.

Mais sans plus attendre, il faut oser ouvrir un espace de débat parlementaire dans lequel le rapport du Médiateur fédéral sur les centres fermés et les alternatives à l’enfermement seraient enfin étudiées. Parmi ces alternatives, l’hypothèse de la surveillance électronique, recommandée d’ailleurs comme solution de moindre mal par Amnesty International, mérite d’être discutée de manière approfondie1.

Dans cette hypothèse, l’État conserverait l’objectif “légal” de garder sous la main les migrants à qui il ne confère pas le droit d’être sur son territoire tout en sortant de l’indignité coûteuse à tous points de vue de les priver de leur liberté.

L’urgence de l’ouverture d’un débat démocratique et de la recherche d’alternatives positives aux pratiques d’enfermement des étrangers est bien ce que rappellent les organisations francophones et néerlandophones qui tentent d’informer et de mobiliser les citoyens.

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