Défendre tous les travailleurs? Le point de vue de la FGTB

La FGTB n’a pas créé de groupe spécifique avec les travailleurs sans papiers. Un choix dicté par une position de principe: tous les travailleurs, qu’ils aient ou non des papiers, doivent être défendus de la même façon. Dicté peut-être aussi par une difficulté fondamentale à mobiliser autour de cette question au sein du mouvement syndical…

Samantha Smith, chargée de mission au bureau d’études de la FGTB Bruxelles: “Nous défendons le droit de tous les travailleurs et n’avons donc pas voulu créer un groupe spécifique pour les travailleurs sans papiers. Nous choisissons plutôt de les intégrer au sein des centrales professionnelles, ce sont elles qui les suivent directement. À Bruxelles, c’est principalement dans la centrale qui gère les titres services qu’ils se trouvent“. Mais les services juridiques des centrales ne peuvent pas tout régler… “Les centrales peuvent défendre les droits sociaux de tout travailleur en cas de licenciement abusif, de non-paiement de son salaire… Mais elles n’ont pas de formation en droit des étrangers. Or, dans le cas des travailleurs sans papiers, droit du travail et droit des étrangers sont mêlés, et nous ne sommes pas assez outillés pour les aider“. 

La plupart des travailleurs sans papiers suivis par la FGTB viennent d’eux-mêmes vers le syndicat “quand ils ont des problèmes”. “Nous en avons aussi rencontré beaucoup pendant le mouvement pour la régularisation. La permanence que la FGTB avait ouverte à ce moment-là continue à suivre les personnes qu’elle avait aidées pour constituer leurs dossiers. On garde des liens, on tente d’avoir des retours sur les résultats de leurs démarches.

Nous défendons le droit de tous les travailleurs et n’avons donc pas voulu créer un groupe spécifique pour les travailleurs sans papiers.

Quand elles sont régularisées et qu’elles ont trouvé un travail, on les envoie vers les centrales adéquates. On ne les pousse pas à s’affilier, nous ne courons pas après les affiliations, mais on leur explique que leur expérience est intéressante et peut servir à aider d’autres personnes“. Le soutien de la FGTB aux mouvements actuellement menés par des sans-papiers passe aussi par un appui matériel et financier. “Nous ne soutenons plus des actions comme les grèves de la faim, parce que nous nous sommes rendu compte que ça ne servait à rien. Ce n’est pas une décision officielle, en fait, on n’a pas vraiment de politique formalisée et concertée envers les sans-papiers. On essaie néanmoins de leur donner les moyens matériels et politiques de s’auto-organiser, même si parfois, on ne partage pas toutes leurs revendications sur le travail…“.

La situation des travailleurs sans papiers n’est pas prioritaire au sein du syndicat. L’ombre de la concurrence plane sur les “autres” travailleurs, mais ce n’est pas la seule raison. “On a des difficultés à mobiliser autour de la question des travailleurs sans papiers, notamment parce que les militants et les délégués ne les voient pas! Les délégués sont surtout dans les grosses entreprises, et ce n’est pas chez Audi qu’on va trouver des sans-papiers! Ils sont plutôt dans les petites entreprises sous-traitantes, où nous n’avons pas de délégués. C’est pour ça que l’essentiel de l’action de notre Interrégionale consiste à informer et à sensibiliser les délégués sur ce que vivent les travailleurs sans papiers, pour attirer leur attention sur ce qui se passe dans les entreprises sous-traitantes et créer une solidarité à partir de là“. 

On essaie néanmoins de leur donner les moyens matériels et politiques de s’auto-organiser, même si parfois, on ne partage pas toutes leurs revendications sur le travail…

Cette sensibilisation prend plusieurs formes, notamment à travers l’éducation permanente. “L’année dernière, nous avons initié des animations dans les centrales bruxelloises à partir de la projection du film “Illégal”. Même s’il ne concerne pas uniquement la question du travail, ce film touche beaucoup les délégués, ils en sortent très réceptifs à la situation des travailleurs sans papiers. De même, dans toutes les formations que j’anime, j’essaie de parler de cette problématique. On fait aussi des publications qu’on diffuse dans les centrales, on en a parlé lors d’un Conseil syndical (une sorte de conférence pour les délégués) à la régionale de Bruxelles… Mais c’est un travail qui est long et pas facile!” 

Propos recueillis par Laurence Vanpaeschen

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