migrations magazine numéro 2

Droits d'asile: Réfugiés, d'hier à demain…

Le deuxième numéro de migrations|magazine est consacré à la question des réfugiés. Dans le milieu du droit des étrangers, on est très à cheval sur la précision des termes. Un “réfugié”, c’est bien plus qu’un “réfugié politique”. Et c’est tout différent d’un sans-papiers avec lequel on n’arrête pas de le confondre.

Et si, au contraire, c’était notre volonté de distinguer et de classer qui ne collait plus avec la réalité et la perception que chacun peut en avoir, ici ou là-bas ? Les motifs de migration et les trajectoires des migrants sont devenus tellement complexes qu’on ne peut plus les démêler aisément. Un retour sur l’histoire montre bien le chemin parcouru. À des époques où le migrant ne devait demander l’autorisation de personne – c’est la société qui l’acceptait ou le rejetait, pas la police –, le demandeur d’asile a toujours été un migrant de qualité supérieure. “Être banni pour la cause de la liberté “, selon la noble motivation de la Constitution française de 1793, ce n’était pas à la portée de n’importe qui. Accueillir Victor Hugo à Bruxelles en 1851, les Hongrois fuyant l’intervention russe en 1956 ou les Chiliens refusant la dictature de Pinochet après 1971 avait aussi l’avantage narcissique de désigner “nos pays” comme des havres de démocratie face aux dictatures de droite et de gauche.

Mais cette motivation proprement politique s’est dissoute au fil des années. Celle-ci ne constitue plus qu’un des cinq critères permettant de se réclamer de la Convention de Genève. En suivant ce que nous disent dans ce numéro les responsables des instances en charge de l’asile, c’est le critère “appartenance à un certain groupe social” qui est de plus en plus sollicité, ainsi que les persécutions imputées à des “agents non étatiques”. D’année en année, on s’éloigne du modèle “chimiquement pur” de l’opposant politique à un régime clairement identifié pour rencontrer des besoins de protection beaucoup plus diffus. Le critère du “groupe social” ne devrait-il pas également s’appliquer à des repentis du trafic de drogue qui se font systématiquement éliminer par les mafias, ou à des habitants des favelas brésiliennes qui risquent la mort s’ils ne se soumettent pas au racket et que les autorités n’arrivent pas à protéger ? Gageons que, dans les années à venir, de nouvelles raisons légitimes de se réclamer du droit d’asile seront opposées aux instances chargées de le gérer.

D’où la question : la Convention de Genève est-elle encore l’outil le plus adapté pour encadrer des demandes de plus en plus diversifiées ? Et, sur un autre terrain, est-on certain que ceux et celles qui ont le plus besoin d’une protection arrivent bien jusqu’à nous, sans en être dissuadés par les multiples obstacles dressés sur leur route ? Interrogations bien légitimes.

Et pourtant, il faut absolument préserver tel quel le système de l’asile, quitte à l’améliorer à la marge sans déroger à sa philosophie générale. Ce système constitue la seule digue arc-boutée sur le droit international qui résiste à la politique conjoncturelle des États, lesquels peuvent toujours décider d’ouvrir ou de fermer le robinet de la migration en fonction de leurs seuls intérêts. Bien sûr, comme chacun le sait, la demande d’asile est utilisée par de nombreuses personnes comme un ticket d’entrée sur le territoire, qu’il leur soit accordé ou non. Mais, dans la balance des intérêts des uns et des autres et au regard du droit imprescriptible de chaque être humain au bonheur, on ne peut pas considérer que l’usage éventuellement abusif du canal migratoire de l’asile dans sa quête d’une vie meilleure soit le pire des délits.

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