Un pas de plus dans la criminalisation des étrangers et des personnes qui les hébergent – CP du 22 janvier 2018

La Commission de l’Intérieur de la Chambre s’apprête à discuter, ce mardi, d’un projet de loi permettant à la police d’entrer de force dans des lieux privés où se trouveraient des personnes sans papiers. Non seulement ce projet criminalise toujours plus les personnes sans papiers, mais il criminalise aussi la solidarité des citoyens qui les hébergent et porte atteinte aux principes fondamentaux de l’inviolabilité du domicile et du droit au respect de la vie privée. Le CIRÉ, la Ligue des droits de l’Homme et le CNCD-11.11.11 appellent les parlementaires à ne pas adopter ce texte dans la précipitation, afin que – cette fois – l’avis des associations soit réellement entendu.

Communiqué de presse du 22 janvier 2018: projet de loi sur les “visites domiciliaires”: un pas de plus dans la criminalisation des étrangers et des personnes qui les hébergent.

Avec ce projet de loi, le gouvernement fédéral permettrait à l’Office des étrangers de demander au juge d’instruction d’autoriser les services de police à pénétrer de force dans une habitation, qu’il s’agisse de la résidence d’une personne sans papiers… ou de celle d’une personne qui l’héberge. Cette “visite domiciliaire” aurait pour but d’arrêter l’étranger, et de fouiller les lieux afin de saisir des documents en vue de son expulsion.

Ce projet de loi est particulièrement inquiétant pour plusieurs raisons.

D’abord parce qu’en permettant à la police de faire irruption à toute heure dans leur vie privée, il criminalise des personnes dont le seul tort est de ne pas être en séjour régulier, ou de faire preuve d’humanité et de solidarité. Qui ne serait pas mal à l’aise à l’idée de recevoir la “visite” inopinée des forces de l’ordre, sous les yeux de ses enfants, et de voir ses tiroirs ou son ordinateur personnel exposés à une fouille éventuelle? C’est une forme de pression larvée permanente et intimidante qui vise à dissuader l’hébergement des sans-papiers. Vis-à-vis des milliers de citoyens qui accueillent chez eux des personnes étrangères, c’est un cap crucial que le gouvernement fédéral s’apprête à franchir

Le message est clair: “La solidarité ou la tranquillité: il faut choisir”

Ensuite, parce qu’il vise à contourner des principes fondamentaux: celui de l’inviolabilité du domicile consacré par l’article 15 de notre Constitution et le droit au respect de la vie privée, consacré par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Si la loi peut créer des exceptions à ce principe, ouvrir la possibilité de pénétrer de force dans le logement d’une personne sans papiers ou d’une personne qui l’héberge, de le fouiller et d’intercepter des documents nous parait complètement disproportionné par rapport aux objectifs poursuivis. D’autant plus que la personne qui héberge l’étranger ne disposera d’aucun recours contre cette violation de son domicile, et que le projet de loi manque cruellement de clarté.

Au vu de la technicité de la matière et des potentielles violations des droits fondamentaux que soulève ce texte, la Commission de l’Intérieur a demandé dans l’urgence une série d’avis aux juges d’instruction, aux procureurs généraux, à la Commission de la protection de la vie privée et aux associations de défense des droits de l’homme. Ces avis seront remis le lundi 22 janvier, la veille des premières discussions. Nous appelons dès lors les parlementaires à ne pas procéder à un vote dans la précipitation, à prendre le temps d’examiner les avis rendus, entre autres par les associations, à les prendre en considération et à ne pas voter le projet tel qu’il est présenté.

Avec ce projet de loi, le gouvernement fédéral entend encore durcir sa politique migratoire, criminaliser toujours plus les sans-papiers et dissuader les milliers de personnes solidaires qui accueillent des personnes étrangères de continuer à le faire.

Un réel débat démocratique doit avoir lieu à ce sujet.

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